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États-Unis – Prix Nobel de la paix : Trump en quête d’une consécration quasi-impossible

actu_express 02 Oct 2025

Donald Trump n’a jamais caché son ambition : entrer dans l’histoire comme lauréat du Prix Nobel de la paix, distinction suprême qui couronne des parcours de réconciliation et d’humanité. Depuis son retour à la Maison Blanche, il a multiplié les gestes, souvent spectaculaires, pour convaincre l’Académie Nobel qu’il mérite de rejoindre le cercle des figures consacrées. Mais son bilan, marqué par la défiance envers les institutions internationales et les fractures sociales profondes qu’il a contribué à nourrir, semble bien éloigné de l’esprit de ce prix.

Quand Washington tourne le dos au multilatéralisme

Sous l’ère Trump, plusieurs institutions emblématiques ont été affaiblies, parfois brutalement. L’OMC a été déstabilisée par une politique douanière erratique, qui a mis à mal des décennies de négociations multilatérales. L’USAID, instrument du soft power américain par excellence, a vu son influence réduite au profit d’une vision strictement transactionnelle des relations internationales. Dans les domaines scientifique et médical, le financement de la recherche sur l’ARN messager a été suspendu, freinant des avancées cruciales. Même les universités américaines, piliers de l’innovation et du débat intellectuel, ont été la cible d’ingérences inédites de l’administration. Quant à la politique migratoire, elle a laissé l’image d’un pays prêt à sacrifier son humanité sur l’autel du nationalisme, avec des pratiques jugées inhumaines par de nombreuses ONG.

La paix ne se décrète pas

Les sages du Comité Nobel le répètent : mettre fin aux guerres et aux conflits, du Soudan à Gaza en passant par l’Ukraine ou la RDC, est essentiel mais ne constitue pas le seul critère. La paix est un processus, pas une photo d’opportunité. Elle exige constance, justice et réconciliation durable. Or, la méthode Trump consiste trop souvent à privilégier la mise en scène – des poignées de mains à Washington entre Kigali et Kinshasa – plutôt que le travail patient de résolution des causes profondes des conflits. Comme si réunir deux adversaires autour d’une table suffisait à effacer des décennies d’hostilités et de haine.

Des ingérences révélatrices

Le paradoxe est encore plus frappant lorsque l’on observe certaines prises de position de Trump à l’international. En Amérique latine, il n’a pas hésité à voler au secours de Jaïr Bolsonaro, l’ancien président brésilien mêlé à une tentative de coup d’État pour se maintenir au pouvoir. En Afrique du Sud, il s’est érigé en défenseur autoproclamé des fermiers afrikaners, dénonçant un soi-disant “racisme anti-blanc” pour contrer la réforme agraire. Autant de postures qui relèvent moins d’un souci de justice universelle que d’un calcul politique destiné à flatter une partie de son électorat. Ces ingérences, loin de renforcer son image de pacificateur, rappellent au contraire son penchant pour l’instrumentalisation des causes sensibles à des fins personnelles.

L’ombre d’Obama

Derrière cette quête effrénée se cache aussi une rivalité personnelle. Trump ne l’a jamais dissimulé : il rêve de décrocher le Nobel qui avait été attribué à Barack Obama en 2009, peu après son accession à la présidence, à la surprise générale. Pour l’ancien magnat de l’immobilier, ce prix symbolise moins une reconnaissance universelle qu’un trophée politique à arracher à son prédécesseur démocrate. Mais la comparaison tourne rarement à son avantage. Obama, malgré les critiques, incarnait alors l’espoir d’un multilatéralisme renouvelé et d’un dialogue ouvert avec le monde. Trump, lui, incarne avant tout la rupture, la confrontation et le repli.

L’indépendance du Comité Nobel

Face à cette agitation médiatique, le Comité Nobel insiste sur son indépendance. “Chaque candidature est jugée sur ses propres mérites,” rappelle son Secrétaire, Kristian Berg Harpviken. À Oslo, les sages veulent se tenir à distance des pressions politiques et médiatiques qui entourent certaines figures. Le 10 octobre, ils trancheront. Leur décision dira si le Nobel demeure fidèle à ses valeurs fondatrices ou s’il se laisse happer par le bruit et la fureur des ambitions personnelles.

Un Nobel de l’ego, pas de la paix

Si Trump devait l’emporter, ce serait moins une consécration de la paix qu’un triomphe de l’ego. Celui d’un homme persuadé que la reconnaissance internationale doit récompenser sa posture plus que ses actes. Ce serait aussi un signal troublant pour un monde déjà fragilisé par les crises climatiques, les conflits armés et la montée des populismes. Le Nobel de la paix, censé incarner l’idéal d’une humanité réconciliée, risquerait alors d’être associé à la démesure d’un dirigeant qui se prend pour un démiurge.
En vérité, l’opération de séduction de Donald Trump en dit davantage sur lui que sur les critères du Comité Nobel. Elle révèle un rapport biaisé à l’histoire, où la quête de reconnaissance personnelle l’emporte sur le bien commun. Or, ce prix, plus que tout autre, rappelle que la paix n’est pas l’affaire d’un seul homme mais d’un projet collectif, fragile et exigeant.

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